La Maison Merry, vers 2000 (Maurice Langlois, coll. SHM)
Le 2 septembre dernier, la Ville de Magog faisait l’acquisition de la maison Merry, bijou de notre patrimoine bâti régional. Cette maison, la plus ancienne du Magog urbain, a été construite en 1821. La propriété actuelle faisait partie d’un immense domaine qui englobait la quasi-totalité de ce qui est devenu Magog. En plus d’être situé en un endroit stratégique, ce site nous ramène à la période pionnière de notre ville dont les fondateurs furent des Américains.
Avant de procéder à son acquisition, la Ville de Magog a d’abord commandé une évaluation de l’intérêt architectural et patrimonial de cette maison, auprès de la firme Bergeron Gagnon inc. de Québec, consultants en patrimoine culturel et en muséologie. Leur conclusion est la suivante : « La maison Merry a une valeur patrimoniale exceptionnelle, d’intérêt non seulement local, mais régional, voire national. Elle serait admissible au statut de monument national classé, notamment à cause de sa rareté et de sa représentativité de la colonisation et du développement de l’Estrie au début du XIXe siècle ».
Grâce aux journaux intimes de Ralph Merry IV, fils du fondateur de Magog, nous connaissons la date de sa construction. En 1821, on y lit les inscriptions suivantes :
- 21 juillet, « La maison est érigée aujourd’hui »;
- 25 août, « Nous avons rassemblé les pierres requises pour la cave »;
- 1er septembre, « D. Young termine les murs de la cave et deux hommes s’affairent à ancrer (étayer) la maison »;
- 17 septembre, « Une partie de nos meubles sont maintenant dans la nouvelle maison, où nous vivons depuis hier. Jusqu’au 3 septembre dernier, il n’y avait pas une seule planche de recouvrement en place ».
La propriété des Merry en 1881, Détail d’une illustration d’époque, tiré de l’Illustrated Atlas of thé Eastern Townships and South Western Quebec, publié par H. Belden & Co., 1881.
Le 9 novembre, l’auteur rend grâce à Dieu de lui avoir permis de construire leur maison en si peu de temps, avec des moyens aussi limités et en dépit de ses problèmes de santé. Il ajoute : « Nous avons maintenant deux chambres confortables et une autre que nous pourrons occuper par température clémente ».
Ralph Merry III, patriote de la Révolution américaine, arrive à l’Outlet, aujourd’hui Magog, le 20 mars 1799, avec sa femme et leurs huit enfants. Ils habitent une cabane de bois rond jusqu’à la construction de cette maison, en 1821. L’année suivante, Ralph III (1re génération) transfère la maison à son fils Ralph IV (2e génération), à la condition qu’il pourvoie aux besoins de ses vieux parents. L’année suivante, Ralph IV transfère la maison et cette responsabilité à son frère cadet Benjamin, qui l’occupera jusque dans les années 1830. À cause d’une interruption dans les journaux intimes de Ralph IV, il est difficile de fixer avec précision la date d’occupation de la maison par Ralph V (3e génération), qui l’habitera jusqu’à son décès en 1887. Par testament, Ralph V la lègue à sa fille Florence (4e génération) et elle l’occupera jusqu’à son décès, en 1928. Florence avait désigné son frère Horace et sa femme comme usufruitiers (à vie) de la propriété, mais ce ne sera qu’au décès du dernier survivant que la propriété pourra être vendue. Horace décède en 1931 et sa femme en 1942.
Le dentiste Marston E. Adams, qui avait épousé, en 1922, Annie Elizabeth (5e génération et fille de Horace) achète la propriété en 1944. En 1927, ils ont eu une fille, Gene Adams (6e génération), qui l’habite avec ses parents jusqu’à son mariage en 1948. Annie décède en 1948 et Marston Adams épouse en secondes noces Nellie Broadbent. Adams décède accidentellement en 1951 et, deux ans plus tard, Ernest Fields, beau-frère de Nellie Broadbent-Adams, devient copropriétaire avant de devenir propriétaire unique. C’est par ce filon que les derniers et actuels propriétaires occupants, Garth et Joy Fields, avaient acquis la maison en 1989.
Le devenir de cette propriété et le rôle réservé à la société d’histoire restent à définir, mais l’objectif visé par tous les intervenants est la mise en valeur de son caractère historique et son accessibilité à l’ensemble de la population magogoise, ainsi qu’aux nombreux visiteurs de notre magnifique région.
Maurice Langlois
Pour en connaître d’avantage sur le sujet, consultez “Les Merry de Magog”, 2008, Société d’histoire de Magog.